Azali Assoumani a désigné deux de ses collaborateurs pour conduire les négociations pour la mise en liberté de l’ancien président Ahmed Sambi, détenu depuis 2018. Le pays d’accueil reste, à ce stade, la pierre d’achoppement pour la réalisation dudit projet auquel l’entourage de Sambi n’accorde que peu de crédit.
L’ex-président Sambi en passe de retrouver sa liberté prochainement ? L’information qui bruissait en 2020 autour de sa libération refait surface. Détenu depuis mai 2018, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi pourrait être relâché. L’initiative vient du chef de l’État lui-même, Azali Assoumani, qui a confié la gestion de ce dossier ô combien sensible à son directeur de cabinet Youssoufa Mohamed Ali, et à son conseiller Houmed Msaidie. Selon nos sources, ces deux émissaires du président de la République revenu au pouvoir en 2016 grâce à …Sambi ont bel et bien pris contact avec un proche du prisonnier politique, en l’occurrence l’ancien ministre des affaires étrangères Fahmi Saïd Ibrahim, qui représente les intérêts du plus célèbre détenu comorien dans ces négociations.
Interrogées, les deux parties représentantes du chef de l’État comme de l’intéressé, disent ignorer le dossier. C’est sans doute pour des raisons évidentes de confidentialité et aussi parce qu’ils savent avancer sur un terrain miné. « Je n’ai jamais été contacté par qui que ce soit pour jouer un rôle de médiation dans cette affaire. Cela étant, même si tel avait été le cas, aurais-je mérité la confiance que l’on accorde à un homme d’État chargé de jouer une médiation en confirmant ma participation à une mission d’une telle importance ? », nous répond Fahmi Saïd Ibrahim, tandis que Houmed Msaidie s’est refusé, lui, à tout commentaire. Pourtant, de sources concordantes, le principe de la libération est acquis, à moins d’un changement de dernière minute. Cependant, la pierre d’achoppement reste le pays d’accueil à ce stade des échanges. Il va de soi que le locataire de Beit-Salam préfère que son redoutable ennemi, tribun et toujours populaire se trouve loin du palais présidentiel.
Aussi, les autorités, elles, optent pour le Maroc, un pays « sûr ». Une proposition qui, selon nos informations, ne conviendrait pas au principal intéressé. Il craindrait en effet de se retrouver dans une « prison à ciel ouvert » une fois dans le Royaume chérifien. « Il est clair que Rabat et Moroni entretiennent de très bonnes relations, entre autres parce qu’Azali Assoumani y a effectué l’essentiel de ses études militaires. Les moindres faits et gestes de l’homme au turban seront scrutés. Il sera sur écoute 24h/24. Ils ne le laisseront jamais quitter le territoire. Sambi craint d’y finir ses jours », suppute un proche de l’ancien raïs. D’après cet interlocuteur, celui qui était président de la République entre 2006 et 2011 serait plutôt disposé à se rendre en Tanzanie pour diverses raisons. D’abord, pour la proximité géographique, Dar es Salam étant à moins de 700 km de Moroni. Et ensuite, pour des raisons politiques. La Tanzanie est en effet l’un des rares pays à avoir entamé des négociations pour demander sa libération là où la France, « pays des droits de l’Homme », se fait discrète.
Proche de l’ancien locataire de Beit-Salam, l’ancien président tanzanien Jakaya Mrisho Kikwete est parvenu à convaincre la nouvelle présidente Samia Suluhu de l’envoyer comme émissaire auprès d’Azali Assoumani pour plaider la cause de Sambi. Il a été reçu à cet effet au palais présidentiel de Beit-Salam lors d’une visite éclair à Moroni, en aout 2021. Cinq mois plus tard, la presse tanzanienne dévoilait le contenu d’un courrier de Sambi dans lequel il demandait à Mme Suluhu de l’aider « afin de recouvrer [sa] liberté dont dépend [sa] santé ». Depuis, des négociations de ce niveau-là n’ont jamais été entreprises, jusqu’à celles qu’Azali a confiées récemment à ses collaborateurs. Condamné en novembre 2022 à la prison à perpétuité « pour haute trahison » à l’issue d’une parodie de procès, Sambi quittera-t-il sa résidence de Voidjuu, transformée en prison annexe, par une amnistie, grâce présidentielle ou simple évacuation sanitaire ? Ce sujet sans véritables enjeux devrait être mis sur le tapis dès que les deux parties se seront mises d’accord sur le pays d’accueil.
Toujours est-il que l’entourage de Sambi se veut prudent et s’interroge sur la sincérité de ces nouvelles négociations entamées depuis fin juillet. « Ce que fait Azali est d’abord un calcul politique. Il sait qu’en évoquant l’éventuelle libération de Sambi, il va calmer les esprits notamment au sein de l’opposition. Curieusement, c’est à la veille des législatives [de janvier 2025] qu’il ressort le sujet du placard », nous confie un proche.
Il faut dire qu’il y a presque 5 ans, en janvier 2020, la justice avait autorisé l’ancien président à partir « à l’étranger pour des soins médicaux ». La Tanzanie était prête à l’accueillir mais les démarches conduites par le ministre des affaires étrangères de l’époque, Souef Mohamed El-Amine, avorteront un peu plus tard. Le pouvoir était profondément divisé sur le sujet. Les faucons ont obtenu gain de cause.
Toufé Maecha
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